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Les Ombres de Gaia
Genre : romance
Rating : PG
Année : mars-avril 2001



Quelques heures plus tard.

Encore une fois sur le départ, Van et Hitomi saluaient une dernière fois Cid. On avait recueilli les soldats perdus de Bazhram, et prit les décisions qui s’imposaient. Les dirigeants des pays concernés, Fleid, Bazhram, Astria et bien sûr Fanélia se réuniraient au palais de Fanélia trois jours plus tard afin de conclure la paix, et arrêter une guerre qui n’avait plus de raisons d’être. Cid avait de nouveau proposé aux deux jeunes gens de passer la nuit à Godazim, pour qu’ils reprennent des forces, mais Van avait refusé. Il avait hâte d’être à Fanélia pour régler les problèmes qui avaient dû se poser sur les différents fronts, et bien sûr au palais aussi. Hitomi et Van se parlèrent peu durant le voyage de retour, qui pourtant se prolongea jusqu’au milieu de la nuit. A leur arrivée à Fanélia, le palais était plongé dans l’obscurité, et ils rentrèrent discrètement, vus seulement par quelques gardes.



Hitomi s’accouda au balcon de sa chambre avec un soupir, et regarda d’un œil morne le paysage pourtant magnifique qui s’offrait à elle.

Cela faisait trois jours qu’ils étaient rentrés, et elle n’avait pas vu Van depuis. Toujours occupé, toujours ailleurs, à régler les problèmes partout où il s’en posait, elle se demandait vraiment comment il réussissait à tout faire. Elianor se plaignait beaucoup de ses absences, mais à chaque fois la douce et raisonnable Séréna lui rappelait que Van était roi, et donc n’avait que peu de temps pour lui. Hitomi demanda une fois à Elianor pourquoi elle n’accompagnait pas le jeune roi dans ses sorties, pour l’aider ou lui tenir compagnie. Elianor l’avait regardée d’un air stupéfait et incrédule avant de lui dire qu’il était hors de question pour elle de passer ses journées sur l’horrible et terrifiant Escaflowne. D’ailleurs la place d’une femme de condition, future reine, n’était certainement pas sur un guymelef.

Hitomi n’insista pas, et essaya comme elle pouvait de ne pas éclater de rire aux grimaces que faisaient Merle derrière le dos de la future reine.

Merle, étrangement plus compréhensive qu’Elianor, ne reprochait jamais à Van de la laisser constamment au palais, et passait le plus clair de son temps autour d’Hitomi, jusqu’au retour de Van qu’elle attendait même s’il rentrait au milieu de la nuit.

Mirana était arrivée, et Hitomi ne l’avait même pas entr’aperçue. Cid était là aussi, ainsi que le président Marun, le dirigeant de Bazhram, unique république de Gaia.

La réunion avait eu lieu la veille, tard dans la soirée, et Hitomi attendait avec impatience les résultats. Quelque chose tomba soudain près d’elle, et elle poussa un cri de surprise.

– Merle ! Tu m’as fait peur !

– Bonjour, Hitomi.

– Qu’est-ce qu’il y a ?

– Oh, rien, j’avais juste envie de te voir.

Mais Merle commença à faire lentement le tour du balcon, signe chez elle d’une envie dévorante de parler. Hitomi attendit patiemment qu’elle se décide, et la fille-chat sauta soudain sur le bord du balcon, se tourna vers elle et annonça d’une voix mystérieuse :

– Après la réunion, hier, Van et Mirana sont restés ensemble pour parler du cas d’Allen…

– Tu étais avec eux ?

– Euh…non, j’attendais maître Van à la porte.

– Tu as écouté leur conversation ? Merle, ça ne se fait pas !

– Je ne l’ai pas écoutée, je l’ai entendue ! se défendit-elle. Et puis zut, tu veux savoir, oui ou non ? Sinon moi je m’en vais !

– Non, non, reste ici, pardon. Alors ?

Satisfaite, Merle miaula, et laissa passer un temps de silence avant de reprendre :

– Mirana voulait que Van lui remette Allen, mais Van a refusé. Il a dit que si Allen se disait innocent, alors c’était vrai, et que de toutes façons, il n’avait aucune raison de tuer Elise et le roi Aston, et puis que c’était pas dans les manières d’Allen d’assassiner les gens. Mirana a dit alors que si Van ne lui livrait pas Allen, et bien elle couperait toute relation avec Fanélia. Van a dit que ce serait dommage, parce que Mirana avait toujours été une amie, qu’elle le resterait toujours pour lui, et aussi que ce serait une perte économique pour les deux pays, mais qu’il ne trahirait pas Allen. Et il est sorti.

Hitomi resta songeuse un instant. Comment Mirana pouvait-elle soupçonner Allen d’avoir assassiné sa sœur et son père ? C’était inconcevable.

– Hitomi…

Merle avait pris sa voix de petite fille apeurée.

– Qu’est-ce qu’il y a ?

– Est-ce que…est-ce que tu crois qu’il y aura une guerre entre Astria et Fanélia ?

– Non, répondit catégoriquement Hitomi. Mirana n’est pas stupide.

Merle parut rassurée, et allait ajouter quelque chose quand la voix de Van leur parvint de la cour. « Merle ! Où tu es ? Merle ! »

Merle se pencha dangereusement, et cria :

– Je suis là, maaaaaaaaiiiiiiiiiiitre Vaaaaaaaaaaaan !

Van leva les yeux, les aperçut. « Bonjour, Hitomi », lança-t-il. Hitomi le salua à son tour, et il se tourna alors vers la fille-chat.

– Merle, je vais au village de Luhm. Est-ce que tu veux venir ?

Elle poussa un cri de joie.

– J’arrive, maître Van !

– Non, Merle ! Ne saute pas !

Mais le fille-chat s’était déjà élancée, sans qu’Hitomi, terrifiée, ne puisse la retenir, et atterrit directement dans les bras de Van, qui, déséquilibré, tomba assis par terre. « Oh, pardon maître Van, fit Merle, penaude. Tu t’es pas fait mal ? » Mais Van à cet instant éclata de rire. Hitomi sentit une émotion étrange l’envahir. Elle avait vu Van sourire, parfois, mais rire, jamais. Cela prouvait qu’il était heureux. Vraiment heureux. Leurs regards se croisèrent soudain, et Van arrêta de rire, mais garda le sourire. Il y avait dans ses yeux quelque chose d’un peu étrange, et Hitomi n’arrivait pas à détourner le regard. Van se remit debout, et levant la tête vers elle :

– Est-ce que tu veux venir avec nous, Hitomi ?

Pétrifiée, hésitante, elle hésita, sentant le danger. Elle n’avait pas assez confiance en elle.

– Non, merci, Van, répondit-elle. Je suppose que Merle a envie d’être seule avec toi, et j’ai promis à Séréna de rester avec elle ce matin…

Ce qui était faux. Merle lui lança un regard de chat sauvage, mais Van, s’il était déçu du refus d’Hitomi, ne le montra pas. Il prit la main de Merle, et sans un regard en arrière sortit de la cour du palais.

Hitomi entra alors dans sa chambre, un peu secouée, ne sachant pas exactement quoi faire. On frappa alors à la porte.

– Hitomi ! C’est Allen.

– Entre !

Allen ouvrit la porte et pénétra dans la chambre.

– Je suis venu te faire un compte rendu de la réunion d’hier soir, dit-il.

– Oh ! merci. Alors ?

– Et bien, Bazhram a accepté d’endosser la responsabilité des dégâts causés pas la guerre. La paix a évidemment été signée.

– Enfin une bonne nouvelle !

– Le problème, continua Allen, c’est que les Sorciers ont disparu. Personne ne sait où ils sont, et évidemment nous courons un gros risque.

Hitomi garda le silence un instant. De toutes façons, les Sorciers réapparaîtraient à un moment ou à un autre, et là…

– Il faut que j’y aille, dit Allen.

Il s’apprêta à sortir, puis se ravisa un instant.

– Oh, Hitomi ! Il faudrait que tu passes voir l’équipage du Croisé. Ils sont très vexés que tu ne sois pas venue les saluer, et Liden prétend que tu les snobes.

– Je suis désolée. J’ai complètement oublié. J’irais les voir le plus tôt possible !

Allen sourit et sortit.



Merle lança à Van un regard en dessous.

– A quoi tu penses, maître Van ?

– Tu grandis, Merle, dit-il sans la regarder.

– Et alors ?

– Un jour, tu auras envie de partir pour vivre ta propre vie, et ne plus me suivre.

– Jamais, maître Van ! Ma vie est à tes côtés. Je te laisserai jamais, clama Merle, indignée. Et puis j’ai pas envie de grandir.

Le jeune roi lui sourit.

– Mais si ça arrivait, Merle, n’hésite pas. Parle-m’en. Tiens, on arrive au village.

Van et la fille-chat entrèrent dans le village, où ils furent accueillis par Luhm.

– Me voilà, Luhm. Je suis heureux de te voir.

– Moi aussi, maître Van. Je regrette seulement de vous déranger.

– Tu ne me déranges pas. Ça me fait du bien de sortir un peu des problèmes du palais ! Qu’y a-t-il ? Rien de grave ?

– Non. Lima vient de mettre au monde un fils, et je voulais vous demander d’en être le Protecteur…Si ça ne vous dérange pas.

Le regard de Van s’éclaira, tandis que Merle sautait partout en poussant des miaulements de joie stridents.

– C’est merveilleux, Luhm ! s’exclama le jeune roi. Félicitations. Bien sûr que j’accepte d’être le Protecteur de ton fils ! Nous ferons la cérémonie dès que possible.

L’homme-loup s’inclina.

– Vous nous faites un grand honneur.

– Non, Luhm, répliqua Van d’une voix grave. C’est toi qui me fait un grand honneur, d’avoir confiance en moi. Après tout, je ne suis qu’un gamin.

– Non, vous êtes un grand roi. Pourrai-je maintenant vous parler d’une autre affaire, plus délicate ?

Van acquiesça, et suivit Luhm jusqu’à sa cabane où ils s’assirent tous deux, pendant que Merle jouait avec des enfants du village.

– C’est à propos de la jeune fille de la Lune des Illusions, annonça Luhm.

Van sursauta.

– Je suppose que vous avez compris que ce sont Merle et moi qui sommes allés la chercher. La pauvre enfant s’inquiétait tellement pour vous qu’elle est venue m’en parler, et nous avons décidé de tenter de contacter la jeune fille. Merle a volé une énergist et a utilisé le fameux pouvoir de l’esprit pour aller sur la Lune des Illusions. Elle a eu des difficultés, mais heureusement, elle est tout de suite tombée sur Hitomi. Si vous voulez des détails sur son séjour là-bas, demandez à Merle. Ce n’est pas de ça que je veux vous parler. Je suis inquiet, et je me demande si la jeune fille est en sécurité.

– Comment ça ?

– Il y a des mouvements dans l’Ouest, du côté de l’ancienne Zaïbacher. Des messagers d’autres tribus m’ont contacté pour me dire qu’ils avaient aperçu des guymelefs de combat à cape mimétique. Des rumeurs prétendent que quelqu’un démonte et emporte les pièces des machines du palais.

– La palais est sous surveillance ! Des garnisons de Vidarus, Fanélia et Astria y patrouillent jours et nuits, le coupa Van. S’il se passait quoique ce soit, nous le saurions.

– Je ne sais pas. Il y a aussi des mouvements du côté des tribus Morph. Quelques uns sont venus se réfugier dans les villages du Nord en demandant asile. Ils disent que chaque nuit, certains des leurs disparaissent mystérieusement.

– C’est inquiétant, je l’admet. Mais en quoi tout ça concernerait Hitomi ?

Luhm tira des bouffés de sa pipe.

– Une intuition, répondit-il. La jeune fille de la Lune des Illusions a toujours tendance à attirer le danger autour d’elle.

Van se tût et réfléchit. Ce que disait Luhm rejoignait son idée étrange que tout ça avait été fait pour ramener Hitomi sur Gaia. Mais pourquoi ? Cela signifierait que les sorciers avaient tout planifié, et mené cette guerre uniquement dans ce but.

– Mais pourquoi, bon sang ? Pourquoi ? s’écria-t-il en se levant brusquement. C’est absurde, complètement absurde !

– Les raisons de Dornkirk étaient-elles plus sages ? remarqua Luhm avec justesse.

Van s’arrêta de tourner en rond. « Je vais rentrer au palais, Luhm, dit-il, et tenter de tirer cette histoire au clair. Si Hitomi n’est pas en sécurité ici, elle repartira. »

Luhm eut un sourire étrange, mais ne fit aucun commentaire. Van sortit, appela Merle, et rentra directement à Fanélia.

Hitomi arriva au palais de bonne humeur. Comme promis, elle était allée voir l’équipage du Croisé qui l’avait accueillie avec des hurlements de joie très peu discrets. D’abord, elle appréhendait un peu les questions et remarques qu’ils ne manqueraient pas de lui faire, mais heureusement, ils s’étaient contenté de la plaisanter sur son refus à la demande en mariage d’Allen lors de son second voyage et aucun d’eux n’avait fait la moindre allusion à Van. Kio et Liden l’appelaient toujours leur Déesse de la Victoire malgré ses protestations. Ils étaient tous si gentils avec elle.

– Mademoiselle ? Excusez-moi…

Une servante la sortit de sa rêverie.

– Oui ?

– Son altesse la reine Mirana d’Astria a exprimé le désir de vous voir dès votre arrivée. Est-ce que vous voulez bien me suivre, je vous prie ?

– Bien sûr !

« La reine Mirana…pensa Hitomi. C’est tellement étrange ! »

Avec un peu d’appréhension, elle entra dans les appartements de son amie. Mirana était debout au milieu de la chambre, et Hitomi eut un choc : au lieu de l’exubérante et coquette princesse qu’elle avait quittée, elle trouvait une reine au visage grave, dont les longs et beaux cheveux blonds étaient désormais tirés en un chignon sévère, et vêtue d’une robe simple et sombre comme celles qu’en portaient Elise.

– Mirana…Je suis tellement contente de te revoir !

Le visage de la jeune reine s’éclaira un peu, et un instant, Hitomi crut retrouver la Mirana qu’elle connaissait.

– Vraiment ? Moi aussi, Hitomi. Mais j’avais peur que tu ne veuilles pas me voir.

– Pourquoi ? s’étonna la Terrienne.

Mirana eut un sourire triste. « Tu sais bien. Asseyons-nous. »

Les deux jeunes filles prirent place dans des fauteuils, et un lourd silence s’installa entre elle, avant qu’Hitomi ne le brise :

– Raconte-moi, Mirana. Parle-moi. Tu as l’air si triste.

– Il s’est passé tellement de choses…murmura-t-elle d’une voix lointaine.

Des larmes apparurent soudain dans les yeux de la reine d’Astria, et malgré ses efforts pour les retenir, elles glissèrent sur son visage fatigué.

– Mirana !

– Je…je suis désolée…

Hitomi se leva d’un bond et s’agenouilla devant Mirana, lui prit les mains.

– Raconte-moi, je suis ton amie !

– Je suis tellement heureuse que tu sois là ! Si tu savais…si tu savais combien je suis heureuse que tu sois là ! J’ai l’impression que maintenant ça ira mieux…Mon père…et Elise… assassinés par Allen…

– Ce ne peut pas être lui !

– Mais on l’a vu, Hitomi ! Des dizaines de personnes l’ont vu ! L’équipage du Croisé a juré qu’il était avec eux mais leur témoignage ne compte pas…Tu sais qu’ils feraient n’importe quoi pour Allen !

– Mais pourquoi les aurait-il tués ? C’est absurde !

– Je ne sais pas, Hitomi, je n’en sais rien ! Mais j’en ai assez de tout ça. La mort de Père et d’Elise, la trahison d’Allen…et…et cette fichue guerre…J’en ai assez d’être reine ! Je…je ne suis pas faite pour ça…Comment Van fait-il ? Je suis tellement fatiguée !

Le cœur serré, Hitomi prit Mirana contre elle en murmurant des mots apaisants.

– Et Dryden ?

– Dryden ! Ce…ce lâche…il est venu me voir l’année dernière pour prononcer publiquement le divorce…il disait qu’il m’aimait…mais en fait il aime sa vie bien plus que moi…il a dit qu’il ne voulait pas être roi…qu’il m’aimait, mais qu’il renonçait à moi car il disait que je ne l’aimait pas…Ce n’est pas vrai, Hitomi ! J’avais appris à l’aimer…Et il est parti…il m’a abandonnée pour retourner sur son navire…Et il a disparu il y a six mois, un peu avant la guerre…J’en ai tellement assez, Hitomi ! Tellement assez…

Lorsque Hitomi ressortit de la chambre de Mirana, une heure plus tard, elle avait perdu toute sa bonne humeur. La détresse de Mirana et son refus de croire à l’innocence d’Allen l’avaient bouleversée. Hitomi entra dans sa chambre, et trouva Merle sur son lit.

– Hitomi ! Van te cherche partout.

– Qu’il aille au diable, murmura-t-elle.

– Quoi ? ? ? cria Merle en sautant sur ses pattes.

– Oublie ce que je viens de dire. Je suis fatiguée.

On frappa à la porte, et Van entra peu après. Il avait l’air soucieux.

– Hitomi, tu ne peux pas rester sur Gaia. Tu es en danger.

– Qu’est-ce que c’est encore que cette histoire ?

Le jeune roi résuma sa conversation avec Luhm, lui parla de ses soupçons, et conclut ainsi :

– On vient de m’apprendre que les garnisons qui surveillaient la Citadelle Zaïbacher ont disparu. Cette fois c’est clair, il y a un rapport avec toi. Il n’est pas question que tu restes.

– Je ne partirai pas, affirma Hitomi, des éclairs dans les yeux. J’ai dit que j’aiderai Allen et je ne partirai pas tant que ça ne sera pas fait.

Une lueur dangereuse s’alluma dans le regard de Van, et Merle, un peu apeurée et sentant venir l’affrontement, se recroquevilla derrière le lit d’Hitomi.

– Tu n’es pas en sécurité ! dit Van en serrant les dents. Tu dois rentrer sur la Lune des Illusions, tu entends !

– Tu n’as pas d’ordres à me donner, Van Fanel !

– Est-ce que tu te rends compte ? fit-il, furieux. Tu te mets en danger pour rien ! Tu es vraiment inconsciente ! Il est hors de question que tu restes ici !

– Vraiment ! Alors c’est parfait ! Je pars ! Je suis sûre que Luhm, ou Gadès, ou Mirana accepteront de me loger !

– Si tu bouges d’ici, j’irais te chercher personnellement avec Escaflowne, et je t’enfermerai !

– Il faudrait savoir ce que tu veux !

Exaspéré, Van fit demi-tour et sortit en claquant la porte, laissant Hitomi blanche de rage et Merle verte de peur.

Il tomba sur Allen qui le regardait d’une air mi-stupéfait, mi-amusé. Il avait apparemment entendue la dispute.

– Tu n’aurais pas pu simplement lui dire que tu ne voulais pas qu’il lui arrive quelque chose de mal ? demanda l’ex-chevalier.

– Toi, Allen, ne te mêle pas de ça ! lança Van d’une voix cassante avant de disparaître dans le couloir, apparemment vraiment furieux.

Au même instant, Allen entendit quelque chose se briser violemment de l’autre côté de la porte. « Et bien, pensa-t-il, partagé entre l’appréhension et le rire, ça promet ! »

Prudemment, il s’éloigna de la chambre d’Hitomi en prenant la direction opposée à celle du jeune roi énervé.

Merle regardait d’un air effaré les restes du vase qu’Hitomi avait projeté à terre dans un élan de rage. Elle ne l’avait jamais vue dans un état pareil. « Comment est-ce qu’il peut se permettre de me dire ce que j’ai à faire ! fulminait la jeune Terrienne. Pour qui il se prend ? Je ne lui ai rien demandé du tout ! Qu’il se mêle de ses affaires ! »

Merle, la trouvant injuste, finit par prendre son courage à deux mains :

– Tu n’as pas le droit de dire ça ! Il veut simplement te protéger.

La colère d’Hitomi sembla disparaître d’un coup, laissant place à une sorte d’épuisement. Elle se passa une main dans les cheveux d’un geste las, et eut un sourire un peu pâle.

– Je sais, Merle. Je sais. Je n’aurais pas dû m’énerver comme ça. C’est juste que…Oh et puis zut, laisse tomber.

– Vous n’êtes que des imbéciles.

– Probablement.

Le regard d’Hitomi tomba sur les débris du vase. Elle se mit alors à genoux et commença à ramasser les morceaux.

– Tu aurais pu appeler une domestique, lança Merle.

– Pourquoi ? Je peux le faire toute seule.

– Et tu fais ton lit tous les matins. Tu ranges toi-même tes affaires.

– Et alors ?

– Elianor ne fait pas ça.

– Elianor est une femme de condition, future reine ! répliqua Hitomi.

Les deux filles éclatèrent de rire, et la tension disparut complètement. Merle sauta du lit et aida Hitomi à ranger les morceaux de verre. Brusquement, la fille-chat leva la tête :

– Hitomi ?

– Oui ?

– Je t’aime bien. Mais t’as pas intérêt à le répéter ! menaça-t-elle.

– Moi aussi je t’aime bien, Merle, répondit Hitomi, émue.

Il y eut un silence, puis Merle ouvrit de nouveau la bouche :

– Tu es au courant pour ce soir ?

– Au courant de quoi ?

– Il y a un dîner officiel, avec Mirana et les autres.

– Ah ? Non, je ne savais pas.

– Van devait te le dire, mais il a dû euh…oublier à cause de votre dispute. Tu vas t’habiller comment ?

– Ben euh…

– T’as pas vu ?

Merle se leva d’un bond et alla droit au placard de la chambre qu’Hitomi n’avait jamais ouvert. Elle se leva et rejoignit Merle qui l’ouvrit d’un geste théâtral, et Hitomi poussa un cri d’émerveillement. Des dizaines de superbes robes de toutes les couleurs y étaient pendues. Elle en sortit quelques unes avec un peu de timidité enfantine, l’air d’une petite fille.

– Elles sont merveilleuses, murmura-t-elle.

– Celle-là t’irait bien ! s’écria Merle en sortant une robe vert émeraude.

Hitomi posa les mains sur la soie douce.

–Tu la mettras ? demanda Merle.

Hitomi acquiesça.

– D’où viennent toutes ces robes ? interrogea-t-elle.

– C’est Van. Dès votre retour de Fleid, il a demandé à Séréna de te faire une garde-robe.

Hitomi reposa la robe.

– Pourquoi est-ce qu’il ne m’en a rien dit ? J’aurais pu le remercier. Il faut toujours qu’il fasse ce genre de choses en secret.

– Tu sais, Hitomi, Van ne dit jamais rien. Il fait. C’est sa façon à lui de montrer aux gens qu’il les aime. Il ne sait pas parler. Je suis avec lui depuis toujours. Je le connais parfaitement.

– Qu’est-ce que tu entends par « il fait » ?

– Et bien, par exemple…il montre ses ailes, c’est une preuve de profonde confiance. Il s’efforce d’être un bon roi, pour ses parents et pour son frère, mais surtout pour son peuple. Il fait d’Allen un général de Fanélia, preuve de respect. Il protège, preuve d’amour.

Hitomi se troubla.

– Rappelle-toi, dit Merle, lors de la Grande Guerre contre Zaïbacher. Il te protégeait tellement. C’était vital pour lui. Il ne pouvait pas te dire qu’il t’aimait, alors il le faisait. Il te protégeait. C’était sa façon de te parler. Mais la plupart des gens ne le comprenne pas.

– Mais…

– Aujourd’hui, même si vous n’êtes plus…enfin, tu comprends…et bien il continue à te protéger, et à se soucier de ton bien-être. Ça prouve qu’il te considère encore au moins comme une amie. Je te laisse.

Merle bondit jusqu’à la porte d’un coup, comme si elle en avait trop dit.

– Merle…attends. Je voudrais te poser une question. Pourquoi est-ce que tu es si gentille avec moi ? Pourquoi…

Mais la fille-chat avait haussé les épaules et s’était déjà enfuie dans les couloirs. Merle avait compris depuis longtemps que rien n’était possible entre elle et Van, et d’ailleurs elle n’avait jamais envisagé une possibilité réelle d’union avec lui. Mais elle l’aimait énormément, et elle voulait plus que tout au monde qu’il soit heureux. Merle était convaincue qu’Elianor ne le rendrait pas heureux, et qu’Hitomi était la seule qui lui convenait. Mais tous les deux étaient tellement retranchés, sur leurs gardes, persuadés d’avoir fait le bon choix, et se blessant volontairement afin de se protéger d’une éventuelle et très probable rechute. Alors si Merle pouvait les aider à se comprendre, et à ouvrir les yeux, elle le ferait.



Le dîner se déroula dans une ambiance malsaine. Hitomi s’était présentée avec Séréna. En la voyant, Van avait eu une expression étrange, et Elianor l’avait foudroyée du regard. Merle, assise dans un coin, regardait la scène avec avidité, curieuse de voir ce qui allait se passer. La table avait été dressée de telle manière qu’il n’y ait pas de risques de tension. Van et Cid était chacun en bout de table. A droite du jeune roi, il y avait Mirana, placée à côté du président Marun, qui avait Séréna de l’autre côté. A la gauche de Van, Elianor, puis Allen, qui était séparé de Cid par Hitomi.

Marun discutait tour à tour avec Mirana et Séréna, ravi d’être entouré de si jolies jeunes filles, Elianor ne parlait qu’à Van ou à Mirana. Van ne disait rien. Hitomi essayait désespérément de parler à Cid et Allen avec égalité.

A la fin du dîner, Hitomi se précipita sur le balcon pour respirer. L'atmosphère de la salle était tellement lourde qu’elle avait eu l’impression de manquer d’oxygène. Elle s’appuya sur la balustrade et regarda les étoiles, en évitant la Terre. Un pas se fit entendre, et Allen s’accouda à côté d’elle.

–Ça va ? demanda-t-il.

– Je déteste ma vie, murmura-t-elle.

– Moi aussi.

Elle leva les yeux vers lui, surprise.

– Toi ?

– Eh oui.

– Comment ça ?

– Eh bien, des trois seules femmes que j’ai aimées, aucune ne m’était destinée. La première s’est mariée en mettant au monde un enfant qui maintenant me déteste avant de mourir, la seconde m’a rejeté…

– On était sous l’influence de la machine à contrôler le Destin, Allen. Je ne compte pas.

– Tu étais sous l’influence de la machine. Pas moi. Je t’ai vraiment aimée, Hitomi.

– Allen…je suis désolée.

– Laisse. Quant à la troisième, elle me prend pour un assassin…

– Mirana. Alors tu l’aimes vraiment.

– J’ai appris à la connaître, et à l’aimer pour elle-même, et non plus parce qu’elle ressemblait à Marlène. Tu vois, j’ai aussi le droit de détester ma vie.

Il y eut un silence, puis Hitomi éleva la voix :

– Oui mais toi tu sers à quelque chose. Tout le monde te fait confiance, Van te respecte, ton équipage t’admire, et tu sais qui tu es, ce que tu as à faire. Je croyais vraiment pouvoir faire quelque chose. Merle m’a dit que tout irait mieux si je revenais. Je l’ai crue. Mais ce n’était que de la vanité. Mon retour n’a rien arrangé du tout.

– Tu as arrêté la guerre !

Comme si elle ne l’entendait pas, Hitomi continua :

– Je voulais tellement aider, réellement, j’aurais voulu que tout s’arrange entre Mirana, Cid et toi, et rentrer sur Terre le cœur en paix, sûre une bonne fois pour toute que tout ça est derrière moi, dire à Shinji que oui, bien sûr je veux vivre avec lui, que c’est ce que je veux le plus au monde, sans réserve, sans crainte de me mentir. Parce que je sais qu’il va se lancer, je l’ai senti. J’avais besoin de venir ici pour être sûre, mettre les choses à plat pour pouvoir avancer dans ma vie sans ce poids que peuvent être les doutes. Mais ça n’a rien changé. Ça a plutôt empiré. Je ne sais plus où j’en suis, je m’embrouille. J’aurais jamais dû revenir. Tout ce que j’ai fait c’est de me troubler encore plus, de me disputer avec Van et…et je crois que j’ai encore trop bu. Je vais aller me coucher. Bonne nuit, Allen.

– Bonne nuit, Hitomi.

La jeune fille disparut dans le palais, et alors Van émergea de l’ombre, s’approcha d’Allen.

– Shinji, c’est son fiancé ? demanda-t-il.

– Je suppose.

Il y eut un long silence.

– J’aimerai savoir ce que le Destin nous réserve encore, murmura Van.

– Moi aussi, fit Allen.

Puis il s’éloigna à la suite d’Hitomi.

Perdu, Van s’accouda au balcon, et regarda la Lune des Illusions. Vérifiant que personne ne regardait, il enleva le haut de son costume de cérémonie, le jeta dans le jardin et sortit ses ailes. Lorsque Elianor voulut le rejoindre, elle ne trouva que quelques plumes douces et lumineuses, et une étrange étoile filante s’éloignant dans le ciel.



Fin de la première partie

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